« Vous êtes-vous jamais rendu compte un peu précisément de ce que c'est que penser, de ce que vous éprouvez quand vous pensez, peu importe à quoi?... Vous dites-vous: je pense cela, quand vous avez une opinion, quand vous formez un jugement. Effectivement porter un jugement vrai ou faux est un acte de la pensée; cet acte consiste à sentir qu'il existe un rapport, une relation... Penser, comme vous voyez, c'est toujours sentir, et ce n'est rien que sentir.»
Destutt de Tracy, Éléments d’Idéologie, I, p. 33-35
L'âne insulaire, au sommet de son roc,
Fixe l'horizon où se meut l'étoffe baroque.
Ces ombres qui la-bas frémissent sous le vent,
Troublent le chant des flots et l'air scintillant.
« Qui donc, sur ce désert de pierre et de silence,
Erre ainsi, inconnu, bravant ma vigilance?
Serait-ce un compagnon, né d'un même mystère,
Ou l'étrange messager d'un dessein sévère?
Et si, sur cette île où tout semble muet,
Dormait un autre cœur par l'énigme habité?
Un être qui contemple, en sa noble hauteur,
Les mêmes cieux ouverts sur l'infini des heures?»
Ainsi songe l'âne, oscillant entre l'espoir
D'un doux partage à naître et l'ombre du devoir.
Car l'inconnu effraie, mais aussi l'appelle,
Comme un lointain éclat qu'enflamme une étincelle.
Il imagine alors, sur ce roc dénudé,
Un étrange tableau, par le vent caressé.
Une poupée se tient, droite, drapée de bleu,
Ses galons étincellent sous l'astre silencieux.
À ses pieds bondit, vif, un petit chien léger,
Ses pattes caressant le roc à peine usé.
Tous deux semblent figés dans ce lieu solitaire,
Comme des rêves éclos sur un autel de pierre.
L'âne, dans ce songe, s'avance prudemment,
Ses sabots résonnant d'un écho lancinant.
«Qui êtes-vous?» murmure-t-il de loin à ces témoins,
Mais nul souffle ne vient lui répondre en chemin.
La poupée, immobile, comme un spectre altier,
Ne tourne pas les yeux, ni ne bouge ses pieds.
Le chien, attentif, fixe l'âne dans le vent,
Comme s'il devinait un présage troublant.
L'âne frissonne alors; dans ce vide absolu,
Il projette ses craintes, ses rêves suspendus.
«Ces formes sont-elles, dans ce lieu minéral,
Un fruit de ma folie ou un don ancestral?
Dois-je braver l'écueil, traverser l'inconnu,
Et troubler ce silence, au péril de ma vue?
Ou bien, sage, attendre que le vent se repose,
Que la vérité m'offre enfin ses apothéoses?»
Ainsi, sur son rocher, il vacille et hésite,
Car nul autre ne sait où l'aventure invite.
Et moi, simple narrateur, depuis un autre bord,
Je ris doucement de ce conflit sonore.
Car l'âne ignore encore ce que je perçois bien:
Ce roc, presque désert, n'abrite que des riens.
Une poupée figée, ornement militaire,
Et un chien, sans dessein, qui erre et persévère.
Mais l'âne, dans sa peur mêlée de désir pur,
Dessine mille scènes, oscillant dans l'azur.
Peut-être cette île, rude et austère,
Cache un savoir ancien, une vérité claire.
Peut-être, en ces êtres que son esprit compose,
Git la clé d'un ailleurs, d'une quête grandiose.
«Et si cette rencontre, se dit-il en tremblant,
Devait révéler ce que je cherche tant?
Si je ne tente rien, murmure-t-il enfin,
Ne serait-ce trahir l'appel du divin?»
Alors, sous les étoiles, il lève le regard,
Et son cœur bat plus fort, embrasé par l'espoir.
Demain, peut-être, à l'aube, quand l'astre sera vermeil,
Il quittera son roc, guidé par le soleil.
Car l'appel de l'inconnu, gravé dans son esprit,
Le pousse à croire encore au miracle d'autrui.
Fixe l'horizon où se meut l'étoffe baroque.
Ces ombres qui la-bas frémissent sous le vent,
Troublent le chant des flots et l'air scintillant.
« Qui donc, sur ce désert de pierre et de silence,
Erre ainsi, inconnu, bravant ma vigilance?
Serait-ce un compagnon, né d'un même mystère,
Ou l'étrange messager d'un dessein sévère?
Et si, sur cette île où tout semble muet,
Dormait un autre cœur par l'énigme habité?
Un être qui contemple, en sa noble hauteur,
Les mêmes cieux ouverts sur l'infini des heures?»
Ainsi songe l'âne, oscillant entre l'espoir
D'un doux partage à naître et l'ombre du devoir.
Car l'inconnu effraie, mais aussi l'appelle,
Comme un lointain éclat qu'enflamme une étincelle.
Il imagine alors, sur ce roc dénudé,
Un étrange tableau, par le vent caressé.
Une poupée se tient, droite, drapée de bleu,
Ses galons étincellent sous l'astre silencieux.
À ses pieds bondit, vif, un petit chien léger,
Ses pattes caressant le roc à peine usé.
Tous deux semblent figés dans ce lieu solitaire,
Comme des rêves éclos sur un autel de pierre.
L'âne, dans ce songe, s'avance prudemment,
Ses sabots résonnant d'un écho lancinant.
«Qui êtes-vous?» murmure-t-il de loin à ces témoins,
Mais nul souffle ne vient lui répondre en chemin.
La poupée, immobile, comme un spectre altier,
Ne tourne pas les yeux, ni ne bouge ses pieds.
Le chien, attentif, fixe l'âne dans le vent,
Comme s'il devinait un présage troublant.
L'âne frissonne alors; dans ce vide absolu,
Il projette ses craintes, ses rêves suspendus.
«Ces formes sont-elles, dans ce lieu minéral,
Un fruit de ma folie ou un don ancestral?
Dois-je braver l'écueil, traverser l'inconnu,
Et troubler ce silence, au péril de ma vue?
Ou bien, sage, attendre que le vent se repose,
Que la vérité m'offre enfin ses apothéoses?»
Ainsi, sur son rocher, il vacille et hésite,
Car nul autre ne sait où l'aventure invite.
Et moi, simple narrateur, depuis un autre bord,
Je ris doucement de ce conflit sonore.
Car l'âne ignore encore ce que je perçois bien:
Ce roc, presque désert, n'abrite que des riens.
Une poupée figée, ornement militaire,
Et un chien, sans dessein, qui erre et persévère.
Mais l'âne, dans sa peur mêlée de désir pur,
Dessine mille scènes, oscillant dans l'azur.
Peut-être cette île, rude et austère,
Cache un savoir ancien, une vérité claire.
Peut-être, en ces êtres que son esprit compose,
Git la clé d'un ailleurs, d'une quête grandiose.
«Et si cette rencontre, se dit-il en tremblant,
Devait révéler ce que je cherche tant?
Si je ne tente rien, murmure-t-il enfin,
Ne serait-ce trahir l'appel du divin?»
Alors, sous les étoiles, il lève le regard,
Et son cœur bat plus fort, embrasé par l'espoir.
Demain, peut-être, à l'aube, quand l'astre sera vermeil,
Il quittera son roc, guidé par le soleil.
Car l'appel de l'inconnu, gravé dans son esprit,
Le pousse à croire encore au miracle d'autrui.
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