– Comment nous prémunir de cette sidération que tous éprouvent face au Cap'tain?
– Face à tous les Cap'tain, mon cher, tous, car ils sont nombreux, mon ami. Ils sont légions. Une légion de petits et grands chefs... inégalement répartis dans toutes les couches de toutes les espèces, se relayant et se remplaçant les uns les autres...
– Y compris chez les perroquets?
– Pourquoi voulez-vous que nous échappions à la règle?
– De quelle règle parlez-vous?
– J'eus dû, la place de règle, parler de maladie... une maladie de civilisation...
– Alors que serait cette maladie?
– Une maladie issue de mauvaises racines qui poussent peu à peu dans la tête des êtres civilisés...
– Des racines dans la tête, mon Dieu! Je les vois là, tout autour de nous... Serions dans la tête du Cap'tain?
– C'est exactement cela et beaucoup plus...
– Que peut être ce plus?
– Notre tête. Celle de chacun de nous et celle que l'on partage...
– Ce que vous me dites est assez "effraxant"!
– Effrayant voulez-vous dire...
– Plus que cela...
– Nous supportons dans tous les domaines et peu à peu, des choses que notre instinct de conservations... de l'âme... ou du cœur... ou de l'esprit, nous ne parlons pas de celui du corps, devrait nous avoir, depuis longtemps, mis en garde.*
– Et cela n'est point?
– Malheureusement non...
– Non, nous vivons dans une anesthésie générale... Nous n'avons ces espèces d'alertes de la douleur ou de la fièvre, nous nous laissons aller. Nous nous laissons couler..*
– Seriez-vous, vous aussi un moraliste défroqué comme le Cap'tain?
– Non, je ne suis point moraliste, je ne suis pas pour la rigueur ou ce que que l'on appelait la morale, ce n'est point du tout cela, je prêche, tel mon maître, pour une sorte de ressaisissement de l'être, d'avoir des vraies définitions dans la vie, des définitions du bonheur, des définitions du courage, des définitions de l'honneur, tout cela est maintenant complètement faussé... nous n'avons que des fausses définitions... Avec de fausses définitions on fait de faux bonheurs... et de faux destins... et des gens malheureux.*
– C'est l'imposture?
– C'est l'imposture...*
* Gilbert Cesbron, Le temps des imposteurs
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